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Yassin – Les 12 rookies à suivre

Yassin

Yassin

À seulement 22 ans, Yassin possède déjà son propre label, Bluebird Music, ainsi que son propre studio. Charbonneur dans l’âme, il a livré le 12 juin dernier son très bon EP « Le temps d’un hiver ». Il n’est encore qu’aux prémices de sa carrière, et si une chose est sûre c’est qu’il n’est pas prêt de s’arrêter là. Sans grande surprise, Yassin fait partie de notre liste des 12 rookies à suivre. 

Salut Yassin, est-ce-que tu pourrais te présenter pour ceux qui ne te connaissent pas encore ?

Moi je m’appelle Yassin, c’est mon prénom et mon nom d’artiste, je viens du 93, de Pantin, j’ai grandi et je suis né là-bas. Ah et j’ai 22 ans.

Yassin

Depuis combien de temps est-ce-que tu es dans le rap ?

Ça fait six ans que j’écris, mais dans mon coin, j’avais un groupe mais c’était rien de très concret. Je suis resté de mon côté, dans l’ombre, et il y a un an j’ai commencé à bosser avec mon grand reuf, on a monté Bluebird Music. On s’est lancés il y a un an et deux mois exactement, mais avant on avait bossé plusieurs mois à fond pour pouvoir gérer le label avec le studio. 

Pourquoi as-tu décidé de devenir rappeur ?

Franchement j’aime trop la musique, mon père fait de la musique, mes parents m’ont fait grandir avec. En fait il y avait un côté « vie d’artiste » que je voulais mener, c’est plus pour ça, ne pas avoir de patrons, d’horaires, de routine, juste être libre. Depuis petit je fais de la musique, du reggae, du rock, du rap. J’ai commencé à rapper un peu comme tout le monde en fait, puis je me suis posé et j’ai écouté des artistes que je n’avais pas écouté comme Cesária Évora ou Ghali. Je me suis dit qu’il fallait que je fasse comme ça. 

Pour toi, le rap, c’est quoi ?

C’est ma vie carrément ! Je suis à fond, il y a un an on m’a dit que j’avais quelque chose à faire alors on a fait notre truc bien. On a nos studios à nous, on passe nos journées dedans, je vais jamais en soirée, regarde par exemple on a un projet qui est sorti vendredi (le 12 juin – ndlr), on était en session dès lendemain !

Quelles ont été tes influences ?

Y en a énormément, Travis Scott, Kanye West, Ghali en Italie, en France je pense à Jul et PNL, c’est vraiment des gens qui m’ont matrixé. PNL surtout, dans l’image, dans la musique… En Angleterre aussi il y a pas mal de petits trucs, des gars comme SL. Au bled y avait ElGrande Toto, Hliwa, Hari, Shayfeen. Les mecs avec qui je traine aussi, Sean et des mecs de mon équipe qui m’écoutent mais qui ne sont pas dans la lumière.

Comment est-ce-que tu définirais ton style de rap ?

Tu dirais quoi toi ?

Je dirais que c’est un rap qui transmet des émotions…

Carrément, j’en parlais avec Guilty de KatrinaSquad, il me disait « tu mets des images dans la tête des gens ». Je dirais que je fais des phrases imagées qui sont pleines d’émotions, mélancoliques, même un peu tristes. Je suis pas dans l’egotrip, je me suis appelé par mon prénom je ne me cache pas, si je suis en galère, que j’ai pas de thunes je le raconte. 

À quel moment est-ce-que tu as senti que quelque chose se passait autour de toi et de ta musique ?

J’ai l’impression que rien ne passe autour de moi encore aujourd’hui, j’ai la tête dans le guidon. C’est des petits trucs qui me font capter, par exemple hier je rentre chez moi vers 4h du matin, y a un mec en train de fermer son restaurant il me dit « wesh t’as sorti un projet toi, c’est de la frappe ! » Je capte souvent des mecs comme Kazmi ou Hooss, quand ils me disent que ce que je fais c’est de la frappe, là je m’en rends compte. J’ai signé avec Believe, quand des gens comme ça donnent de la force et de l’importance à ce que tu fais, tu te dis qu’ils comptent sur toi.

Une des premières fois où on t’a vu c’était au Planète Rap d’Hayce Lemsi, en janvier 2019. Tu gardes quel souvenir de ce moment ?

Mon reuf il vient du 17e, il a grandi là-bas. Il a grandi avec Hayce Lemsi, donc quand il a su que son frère faisait de la musique il a voulu direct écouter, il gravé kiffé, on a bossé en studio. À un moment on taffait et il m’a dit de venir à son Planète Rap. Ça m’a donné de la force.

Alors Planète Rap, ça propulse vraiment ?

Moi je pense que c’est pas Planète Rap c’est l’artiste lui-même qui se propulse. C’est un plus bien sûr, s’il y a moyen de le faire fais-le mais si tu y vas et que t’es éclaté ça va rien faire. Je pense vraiment que c’est l’artiste qui se propulse, pas juste le Planète Rap. C’est une expérience, ça donne de la confiance, si on t’invite fais-le ne refuse pas, ça peut t’apporter quelque chose en plus. Moi c’est pas ça qui m’a fait décoller, mais mentalement ça fait un petit truc, ta daronne elle t’entend à la radio, c’est quelque chose quand même. 

Ensuite tu es revenu sur celui de Kofs, en février dernier. Elle s’est faite comment la connexion entre vous ?

En fait il est venu enregistrer un titre au studio tu vois, et le manager de Kofs on l’a connu avant avec Hayce Lemsi. Donc on s’est croisés, il avait son Planète Rap, y avait de la place et il nous a ramenés, il a fait le bon. J’y suis allé et c’était le bordel, on était un million là-dedans, mais j’ai eu de très bons retours sur mon freestyle. Ça fait grave plaisir que Kofs ou Hooss m’invitent (sur le titre « DBZ » de son EP « Prohibé, chapitre 1 : Le retour du H » sorti le 24 avril 2020 – ndlr). C’était « Le retour du H » en plus, il pouvait venir avec gros artiste et il m’a choisi moi.

Tu as aussi envoyé tes freestyles GTO sur YouTube et ils ont eu un assez gros succès, notamment « GTO 2 ». C’est quelque chose qui va rester pendant ta carrière, à l’image d’un Binks To Binks ou d’un Afro Trap ?

Ouais à fond, j’en ai pas fini avec GTO. C’est un univers où il y a un truc autour, les gens dans la rue ils m’appellent « la moto » carrément. J’ai réussi à faire un truc bien, alors on a fait le deux puis le trois, et le quatre. Ce n’est pas terminé, j’ai plein d’idées pour les GTO, j’ai envie de faire un GTO international par exemple. 

Tu as sorti ton nouveau projet, « Le temps d’un hiver » ce vendredi 12 juin. Raconte-moi comment tu as conçu ce projet ?

Ce projet c’est un peu pour finaliser la boucle avec les GTO, « Hami » et tout, mettre un terme à cette boucle-là pour en relancer une nouvelle. J’écris pas en fait, j’arrive en studio et je fais mon truc, la prod je ne l’écoute jamais à l’avance. J’arrive au studio, on balance la prod, j’ai 7-8 toplines, on mélange tout ça et je rappe par dessus. C’est les mots du moment, les refrains des GTO c’est en impro. Le but c’est de montrer un truc différent, on n’est pas obligés de raconter tous la même chose.

Yassin – Le temps d’un hiver

J’y vois aussi un peu une volonté de t’ouvrir, de te confier… Ce n’est pas « risqué » pour toi de te dévoiler musicalement dans un premier projet ?

C’est mon style aussi, se dévoiler sans trop se dévoiler, parce que dans les sons c’est très familial, très sentimental. Dans ce qu’on fait maintenant il y a un peu plus d’énergie, des sons dansants, mais en vrai je suis dépressif dans mes sons, alors que je rigole tout le temps dans la vie. J’essaye de raconter des trucs qu’on vit tous, d’une manière différente. Je me dévoile sans trop me dévoiler quand même. C’est se dévoiler mais pas non plus raconter trop ma life, j’ai encore trop de trucs à raconter.

Il n’y a aucun featuring sur ton projet, c’est une volonté de ta part ?

Une grosse volonté oui. Après, le projet dure 38 minutes, les sons durent tous entre trois et quatre minutes. Avec un feat ça aurait été nécessaire de s’adapter, alors que je voulais monter ma niche de mon côté. J’avais trente sons à sortir, j’ai du faire un tri dans le projet sinon il aurait vingt titres, et c’est un EP ! On a rafalé pendant un an et on montre la finalité avec « Le temps d’un hiver », le feat n’aurait pas eu sa place. C’est un premier projet aussi, il fallait que je me montre.

Si tu devais faire découvrir ta musique avec un seul son, ce serait lequel ? Et pourquoi ?

En vrai de vrai, à quelqu’un que je ne connais pas je lui montre un son qui n’est pas sorti. Mais sinon je lui ferais écouter « Hami », de cette année c’est le son que je préfère, il y a tous les petits détails de moi : la voix grave, la voix super aiguë, un gros refrain, un pré-refrain long, deux longs couplets, des mouvements de flows…

Imaginons, tu as un projet 15 titres qui arrive et tu as le droit à 3 featurings, tu choisis qui ?

Tu connais je cale Jul, obligé, qui ne rêve pas de ce feat aujourd’hui… Après Travis Scott, et en dernier c’est une artiste décédée, j’aurais tellement aimé faire un morceau avec Cesária Évora. Ça aurait été un super son, ça aurait eu de la gueule. C’est elle qui m’a motivé à autotuner, j’étais vraiment en mode trap noire, j’ai écouté Cesária Évora et j’ai eu envie de faire d’autres choses, des prods plus douces, ça a suivi avec « Maria », « Hami », les GTO… Nous aussi on peut chanter, on est pas obligés de dire « nique ta mère ».

Comment est-ce-que tu vois l’évolution de ta carrière ?

Là je vais commencer à me montrer plus, être sur les réseaux (il ne gère pas lui-même ses réseaux sociaux et n’a pas de téléphone portable ! – ndlr). C’était un choix aussi, pour créer mon univers autour de ma musique, je voulais que les gens écoutent la musique en elle-même et pas ce côté réseaux sociaux en mode si ton Instagram est frais t’es validé. Maintenant, les sons vont évoluer, dans la couleur ça va changer, il y a des gens autour de moi j’ai envie d’interagir avec eux. Donc l’évolution ça va être ça, être plus proche des gens parce que la musique me le permet.

On peut s’attendre à quoi pour la suite de ta carrière ?

Y a un truc improbable, on a calé un feat improbable qui arrive. Je suis en train d’essayer une nouvelle couleur musicale qui est dingue en vrai, qui va bien plaire aux gens je pense. Sinon il faut rester à l’affût cet été et en septembre surtout. Je ne vais pas m’arrêter du tout, je vais envoyer. Même au niveau du label on va essayer de tout montrer au public, on va développer l’image et la musique cet été et dès septembre ça va rafaler. 

 

Dorian Lacour