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Alonzo, le chef des chefs dans « Capo Dei Capi Vol. II & III »

Alonzo Capo dei Capi

Alonzo Capo dei Capi

Six ans après « Capo Dei Capi », qui a été un véritable tournant dans sa carrière, Alonzo est revenu le 26 mars 2021 avec les suites de sa mixtape. Au programme, un double-projet de 29 titres, riche en featuring, dans lequel l’artiste du Plan d’Aou continue de peaufiner la recette qui a fait de lui une figure majeure du rap en France ces dernières années. 

Le 12 février dernier, Alonzo dévoilait le clip de « CAPO », dans lequel on pouvait voir de nombreux invités. En réfléchissant un peu, on pouvait deviner qu’il s’agissait des featurings de « Capo Dei Capi Vol. II & III ». Cette manière d’annoncer les invités d’un projet, bien que sûrement déjà vue à l’étranger, est apparue comme un joli coup de communication, dans une industrie française où les rappeurs doivent renouveler d’inventivité pour faire parler d’eux.

Pari réussi pour Alonzo, qui pouvait de toute manière s’appuyer sur une fanbase solide, mais qui a réussi avec ce coup d’éclat à faire naitre une réelle attente autour de son projet.

Les deux facettes de « Capo Dei Capi Vol. II & III » apparaissent assez nettement à l’écoute. Dans le volume 2, Alonzo fait la part belle au kickage. Bercé par des prods trap sur lesquelles il a ses habitudes, il fait étalage de sa technique et de son sens de la formule. Quelques morceaux sont plus solaires, comme « Ami ou ennemi » ou encore « Mayday », mais ils sont minoritaires dans cette partie.

Le travail du Marseillais sur son flow est d’ailleurs impressionnant, quand on jette un coup d’œil dans le rétro. Fini les flows parfois un peu poussifs ou monocordes, et les punchlines faciles, qu’on pouvait retrouver dans ses projets d’avant 2015. Désormais, et c’est le cas depuis un bon moment maintenant, Alonzo maitrise complètement son rap, ce qui lui permet de s’ouvrir à une nouvelle musicalité.

Cover : Alonzo – Capo dei Capi Vol. II (Fifou)

Un projet long, qui évite d’être lassant

La partie 3 est justement celle qui fait la part belle à la musicalité, avec des top lines autotunées, plus solaires, sur des beats dansants. Même si le découpage reste de mise, notamment dans des morceaux comme « Ivar », « Bonnet A » ou « Boîte séquentielle », le ton de cette dernière partie est plus léger. Entre morceaux romantiques terriblement efficaces (« Dangereuse »), bangers estivaux (« Dinero », « La Seleçao ») et même morceaux club (« Nineta »), Alonzo montre toute sa polyvalence dans « Capo Dei Capi Vol. III ». Même si « Capo Dei Capi Vol. II & III » ont été pensées comme des mixtapes, ne nécessitant pas nécessairement de fil conducteur, on sent qu’inconsciemment (ou pas) l’artiste a réfléchi à l’agencement des morceaux. 

Cover : Alonzo – Capo dei Capi Vol. III (Fifou)

Bien que sorties en même temps, les deux parties auraient très bien pu être séparées de six mois, sans que cela ne pose aucun problème. Au contraire même, dans une période de sur-productivité musicale, il aurait pu être judicieux de ne proposer que « Capo Dei Capi Vol. II », pour alléger la mixtape qui dure au final presque 1h30. Ça reste un choix de l’artiste, et les premiers chiffres de ventes semblent prouver qu’il n’a pas eu tort de faire ainsi. De toute manière, le format mixtape, si tant est qu’il ait encore un sens aujourd’hui, se prête à une écoute morceau par morceau.

À l’inverse d’un « JVLIVS II », « Capo Dei Capi Vol. II & III » n’a pas de réelle valeur ajoutée à être écouté d’une traite, et en cela la longueur du projet n’est pas réellement handicapante. De nombreux morceaux, comme par exemple « La Seleçao », « Ami ou ennemi », « Dernière fois » ou encore « Dangereuse » sont des singles en puissance.

Des invités aux univers forts tous mis en lumière

Les featurings, nombreux, permettent de diversifier le plaisir d’écoute. Franglish amène sa maitrise des instrus R&B sur « Mayday », Tiakola son talent pour les mélodies sur « Ami ou ennemi », et « Dernière fois », la suite poignante du hit « 1ère fois » (certifié single de platine) avec Imen ES, est également disponible en morceau bonus.

Le statut d’Alonzo, entre deux générations, ni vraiment ancien, ni vraiment jeune, reste particulier. Cela lui donne un rôle de grand frère assumé, dans le featuring avec Imen ES bien sûr, mais aussi dans « 280 », un morceau ultra-efficace sur lequel est convié ZKR. Alonz’ n’hésite pas à aller se frotter à une jeunesse pétrie de talent, tout en montrant qu’il est plus que jamais dans l’air du temps. Le morceau « Marié à la street », sur lequel les étoiles montantes Bosh et DA Uzi sont invités, confirme cela. 

Bien sûr, Marseille est mise à l’honneur, notamment dans « Capo Dei Capi Vol. III ». Jul et Naps délivrent ainsi leur magie sur le hit « La Seleçao », Soso Maness montre une nouvelle fois qu’il est impressionnant sur des beats electro, sur « Nineta », et Kofs rappe à cœur ouvert sur « Comme un loup ». L’Algérino s’associe à Soolking sur le morceau festif « Dinero » et SAF fait équipe avec le lyonnais Big Ben, qui travaille avec Alonzo depuis longtemps, dans le doux-amer « Territoire ».

Enfin, comme à son habitude, SCH délivre une prestation cinq étoiles sur une prod de DST The Danger, dans le morceau « Goyard », où les deux rappeurs transpirent le charisme. Certes les featurings sont nombreux, mais dans un double-projet aussi conséquent, ils sont les bienvenus, pour briser une éventuelle monotonie. Le tour de force d’Alonzo est de réussir, à chaque fois, à se retrouver dans la proposition musicale de ses invités. 

Parvenir au sommet, et y rester

Finalement, « Capo Dei Capi Vol. II & III » sont peut-être les projets dans lesquels Alonzo est le plus polyvalent. On sait depuis longtemps qu’il est capable aussi bien de briller sur une trap sombre que sur une ballade romantique autotunée, il confirme maintenant que les prods electro club voire même R&B ne représentent pas une difficulté pour lui.

On retrouve même un morceau drill, « OOP », qui reste efficace même si pas transcendant. L’éclectisme d’Alonzo se retrouve dans son rap, dans ses choix d’invités, de beatmakers (Slaik, JXN Beats, Shaz, StillNas, Argo Da Hitmaker, Fakri Jenkins, Fxnder, SNK, Hood Star…), et donc, au final, dans l’ensemble de sa musique.

Avec 14 170 ventes en première semaine (le cinquième meilleur démarrage de l’année à l’heure où sont écrites ces lignes), le rappeur confirme son statut de figure incontournable du rap en France, et encore plus à Marseille.

Pour parler de longévité, les noms de Booba et de Rim’K reviennent souvent, et c’est logique, mais il ne faudrait pas non plus oublier le parcours d’Alonzo, qui se retrouve parmi les meilleurs vendeurs de l’année presque 20 ans après « Block Party », le premier album des Psy4 De La Rime. Si Soprano est devenu une superstar, Alonzo n’a pas à rougir de sa carrière, qui n’a été qu’une constante évolution vers un rap mieux maitrisé et mieux raconté.

Bien sur les débuts sont loins, mais la fin semble, elle, loin d’être proche. Asseoir sa place dans le game, durant aussi longtemps, et parvenir à rester au top malgré les changements de public, de modes de consommation et même de musique, c’est peut-être ça, au final, le fameux braquage vocal à visage découvert.

Écouter « Capo dei Capi Vol. II & III » sur toutes les plateformes de streaming.

Dorian Lacour