Jeune ancien, car présent depuis un bon nombre d’années au sein du rap français, mais pas encore omniprésent dans la tête du grand-public, Mayo est de retour en cette fin d’année 2023 avec le deuxième volume de son projet « Yoski ». Pour l’occasion, nous avons rencontré le natif de Stains pour parler de la construction de ce projet, de ses passages par la case prison ou encore de son univers assez unique.

Journaliste (Tancrède) : Mayo, comment ça va ?

Mayo : Ça va et toi ? Tranquillement ?

Tu reviens en cette fin d’année avec « Yoski 2 », deux ans après le premier volume, comment tu as abordé la création de ce projet ?

Je voulais partir sur les mêmes bases que le précédent. L’objectif c’était de se propager et de faire rentrer les gens dans mon univers, d’élargir mon public. Je l’ai réalisé de manière assez classique, morceaux après morceaux. J’ai aussi essayé de faire des choses assez différentes pour toucher un public féminin par exemple.

Cover : Mayo – Yoski 2 (© Fifou)

Concernant la création de tes titres, comment tu travailles ? En studio ? Chez toi ?

J’aime beaucoup travailler en studio mais en vrai je travaille tout le temps et partout. Si j’ai une mélo en tête, peu importe où je suis, je la note quelque part, je la bloque dans ma tête, et je la travaille direct quand j’arrive au studio.

Tu es présent depuis 2014, quel regard portes-tu sur ton parcours jusqu’ici ?

Y a des moments où j’étais pas actif, des fois je me sens un peu à la bourre (rires). Je la trouve bien mais à la fois compliqué. Même au niveau des médias on a pas vraiment été soutenus. Y a des petits bémols comme ça mais sinon ça va hein…

© Fifou

Justement ta carrière a été parsemée d’allers-retours en prison, comment tu as vécu cela sur le plan artistique ? Sur le plan personnel ?

Sur le plan artistique je l’ai super mal vécu parce qu’à chaque aller-retour en prison c’est un retard que je prends (soupire). Sur le plan personnel j’en ai tiré des leçons, aujourd’hui je sais que je n’ai plus rien à voir avec la police. Et puis ça m’a focus sur ma musique parce que je sais que je veux plus connaitre tout ça, donc oui, il faut que je me concentre à 100% sur ça maintenant.

Comment as-tu réussi à repartir de plus belle après cette épreuve ?

Ça n’a pas été très difficile parce que j’ai toujours été dans le délire de la musique. Et puis j’ai écrit en prison pour m’entraîner et me conserver artistiquement. Après je crois que je n’ai gardé aucun texte écrit en prison…

Dans tes morceaux tu utilises énormément le chant sur des prods contrastées entre luminosité et obscurité… comment tu définirais ton univers ?

Mon univers se situe entre la mélancolie, la joie et l’Afrique. L’Afrique c’est dans mes sonorités et mes flows, comme la joie en vrai, et la mélancolie c’est mon coté rap français, tout ce que j’ai vu et vécu.

Tes sonorités sont très ensoleillées ou nocturnes sans jamais vraiment se ressembler… où tu puises ton inspiration musicale ?

Je la puise dans ce que j’écoute. Beaucoup de musique africaine, de rap américain, français aussi. Et puis aussi dans ma vie de tous les jours, dans mon vécu. Je m’inspire des américains mais par contre je ne suis absolument pas dans le copier-coller.

Autre point de ta palette artistique, ton flow coulant peu articulé, comment ça t’es venu ?

En fait, je te dis la vérité moi je m’en rends même pas compte. Et vu que je m’en rendais même pas compte c’était naturel quoi. Quand j’ai capté le truc j’ai commencé à faire attention. Je pense que c’est une lacune mais qui à la fois fait un petit flow. Je te dis lacune parce que par exemple un mec qui m’écoute pour la première fois il va peut-être pas comprendre et donc pas se plonger pleinement dans mon univers…

Sur le morceau « Paris » tu abordes la vie parisienne, est-ce que le fait d’habiter dans une telle ville t’aide à écrire ?

Quand même, on est au cœur de plein de choses. Y a des gens qui grandissent dans des endroits où c’est que des influences extérieures qui les inspirent. À Paris y a des mecs qui n’ont jamais mit les pieds dans le ghetto, il y a plein de mondes qui se mélangent. Ça aide !

Avec « Boubou » tu parles de choses intimes comme ton fils, est-ce que ça te tenait à cœur d’aborder ce sujet ?

C’est la première fois de ma carrière donc oui, et puis mon fils est né deux jours après mon entrée en prison, du coup c’était pour moi une manière de lui rendre hommage. Le morceau s’est fait de manière très spontanée, c’était instinctif, les premières phrases sont sorties, ça parlait de mon fils et ça s’est enchainé.

C’est des genres de morceaux que tu aimerais plus faire ou tu penses que ça ne collerait pas avec ton public ?

Des fois y a des gens dans la vie que tu portes dans ton cœur et je vois ça comme une manière de leur rendre la pareille. Là je l’ai fait pour mon fils, la prochaine fois ça sera peut-être pour ma mère, pour d’autres gens que j’aime.

Avec l’outro qui est plus mélancolique que le reste du projet on ressent bien l’effet point final du projet… est-ce que c’est une ouverture sur un potentiel premier album ?

Non ça ne voulait pas dire ça, c’était une manière de terminer le projet, de faire un point sur mon état d’esprit général, de dire voilà je pense ça, je veux parler de ça…

Sur « Yoski 2 » on a un gros casting d’invités avec Ninho, Niska, Maes, UZI et Rsko… comment tu les a choisis ?

À la base je les connais tous excepté UZI que j’ai connu récemment. Rsko j’étais avec lui à ses débuts, il a pas commencé à rapper avec moi mais il m’avait sollicité pour intégrer mon label, mais moi à l’époque j’étais pas en mesure de le faire rentrer dans mon label… j’écoutais tous ses morceaux.

Niska pareil, on se connait depuis longtemps, c’est lui qui avait parlé de moi à Capitol pour que je puisse signer chez Millenium, et puis il m’avait fait rencontrer Ninho. Maes on était déjà connectés, il me parlait de mon travail. Guy2Bezbar aussi, on se connait depuis belle lurette. Sur « Yoski 2 » j’ai voulu marquer le coup, c’est familiale.

Et puis ce sont des mecs qui kiffent tous mon taff.

Comment tu as taffé le morceau avec Maes ?

Ça s’est fait à distance. Mais comme pour tous les invités, j’ai vraiment voulu aller dans l’univers des artistes. Je voulais pas qu’ils viennent pour faire du Mayo.

Le projet comporte 15 titres, tu n’as pas eu peur de faire un projet trop long ?

Je pars du principe que mon dernier projet est sorti il y a deux ans. Ça faisait longtemps que j’avais rien sorti donc 15 titres c’est pas exagéré, et puis y en a qui étaient déjà sortis. Partir sur une base de 5 inédits solos, 4 featurings inédits, je trouvais ça cool. C’est sur que les longs formats se consomment moins et qu’il faut s’habituer au marché mais je pense qu’il faut faire ce qu’on kiffe en priorité.

Après ce projet à quoi on peut s’attendre ? Un troisième volume ? Un premier album ?

J’ai déjà la suite en tête, je pense que l’idéal serait de venir avec un gros projet en fin d’année prochaine et entre-temps sortir un EP ou une nouvelle mixtape.

Ça tue ! Merci à toi pour ton temps, on a hâte de voir la suite !

Merci à vous Midi/Minuit, je kiffe ce que vous faîtes !

Écoute « Yoski 2 » de Mayo sur toutes les plateformes de streaming.

Interview : Tancrède