Après plusieurs jours de suspense, Jul a enfin annoncé quelle cover avait été retenue pour son album « La machine ». C’est Charles Nardin aka Zeiqh qui a été sélectionné par l’artiste. Il s’est confié à Midi/Minuit pour parler de son parcours, de son rapport au rap et de ses ambitions. 

Salut Charles, parle-moi de toi, quand est-ce-que tu t’es mis au graphisme ? 

Salut ! Alors je m’appelle Charles, j’ai 19 ans et j’ai commencé le graphisme en 2012-13, parce que je voulais me faire une bannière YouTube, des logos, quelques petits trucs. C’était simplement une passion. Sauf qu’au fur et à mesure le design m’attirait de plus en plus, bien plus que les études classiques. Au bout d’un moment j’ai arrêté les études pour me mettre dans le graphisme, le design 3D. Rapidement j’ai commencé à chercher des écoles, mais sans le bac c’était compliqué, j’ai cherché à droite à gauche et j’ai fini par trouver une petite école à Bordeaux. Je me suis dit que c’était bien beau de vouloir faire des images mais je n’avais aucun diplôme, aucune certification… Donc j’ai commencé par faire un an de motion design à Bordeaux et je viens de terminer un an d’infographie dans la même école. 

Donc explique-moi, où es-tu allé chercher tes inspirations pour la cover de « La machine » ?

D’abord je me suis demandé ce que c’était la machine. Je me suis dit « ok c’est Jul la machine, il produit à fond ». Après je me suis demandé ce que les gens allaient faire. Globalement, Jul en machine. La machine finalement c’est une machine à disques, à faire des tubes, c’est l’OVNI qui code les titres dans la tête de Jul. Avec Marseille en fond, parce qu’il ne peut pas y avoir une cover de Jul sans un rapport à Marseille.

Cover : Jul – La Machine (© Zeiqh)

Ça t’a pris combien de temps, à peu près, de la finaliser ?

2-3 jours à fond, parce que la deadline était assez courte au final et que je m’y suis pris assez tard.

Tu as donc répondu à un appel d’offre, tu penses que ce genre de procédé est en train de bouleverser le monde du rap ?

Oui et non, parce qu’à un moment si dans un domaine un gars sort du lot il va prendre le trône. Mais maintenant tout le monde peut arriver avec son ordi à faire du beatmaking, de la réal, du graphisme… Donc oui, ça bouleverse les codes. Il n’y a plus ce côté « si t’es pas depuis 10 ans dans le rap tu t’intègres pas ». Moi du jour au lendemain je suis passé de rien à peut-être une pochette platine. Et puis ça laisse la place aux jeunes de s’exprimer, c’est bien.

Tu fais quoi aujourd’hui ? Encore les études ou tu travailles ? 

Je suis toujours dans les études mais depuis deux ans je suis auto-entrepreneur. J’avais commencé à avoir quelques clients par ci par là, mais à un moment une structure qui s’appelle PRISM, associée à Affranchis, m’a contacté. Pour bosser avec eux il fallait que je me déclare en auto-entrepreneur. Donc je suis en freelance depuis deux ans, j’ai mes clients et j’ai mes études à-côté, ça se passe plutôt bien, je m’en sors.

Quand tu as vu l’appel d’offre de Jul, qu’est-ce-qui t’a traversé l’esprit ? 

C’est Jul, j’écoute forcément en tant qu’amateur de rap. J’avais déjà fait quelques petits trucs dans le rap. J’avais bossé sur la cover de DTF (« On ira où ? ») et j’étais en contact avec Fianso, j’avais fait des covers pour Sifax et Zeguerre aussi, pour des singles. Je me suis dit « ça me coûte quoi d’essayer ? » Si ça passe c’est chanmé, si ça passe pas c’est pas grave.

Cover : DTF – On ira où ? (© Zeiqh et Igniseum)

Jul c’est un rappeur que tu kiffes ? 

J’écoute à fond, très fort, très très fort. C’était un peu un rêve, je me dis « comment arriver à se faire repérer ? à se démarquer ? ». Et puis il y a eu tout ça, c’est complètement fou.

Tu as reçu beaucoup de soutien, notamment sur Twitter où ton tweet compte plus de 25 000 retweets et près de 95 000 likes (!), tu t’y attendais ? 

Absolument pas ! C’est un truc de ouf, quand je l’ai postée j’avais vu déjà quelques covers qui avaient eu beaucoup de soutien et j’avais peur que la mienne passe inaperçue. Puis au fur et à mesure, il y eu 100 likes, puis 200, puis 500, puis 2 000-3 000… C’est n’importe quoi, c’est fou. Ça fait longtemps que je suis sur les réseaux sociaux, j’avais eu mes petits buzz à mon échelle, autour des 1 000 likes, mais jamais de cet ampleur.

Tu envisagerais de faire carrière là-dedans (dans les covers de rap) ? Ou tu as juste fait ça comme ça et ça a pris une très grande ampleur ? 

Avant je n’envisageais pas du tout ça, je comptais partir sur de la publicité ou de la comm, j’avais prévu d’aller à Londres l’an prochain, mais là avec tout ce qu’il s’est passé ces derniers jours, ça a changé beaucoup de choses. Je ne veux pas être fermé à quoique ce soit, aujourd’hui j’ai des opportunités dans le rap, je ne vais pas m’en priver. C’est un plaisir avant d’être un taff, mais je ne veux pas me fermer… Si je pouvais faire des choses dans la mode, ou dans le gaming j’aimerai bien. Mon objectif c’est de me faire plaisir et de bosser avec des gens que j’apprécie.

Il y a notamment Raplume qui a relayé ton travail. Ça fait quel effet d’être validé par le milieu du rap ? 

C’est génial clairement, parce que comme je disais je n’étais pas du tout là-dedans avant. De voir que je me fais relayer par des médias spécialisés, ils ont l’habitude d’en voir des covers, et pourtant ils relaient. J’ai reçu un petit message de leur part me disant que ça leur plaisait, ça fait chaud au cœur !

Tu n’as pas été retenu dans la première pré-sélection de Jul, ça t’a pas embêté un peu ? 

D’un côté ça m’a surpris, j’étais déçu, j’ai vu l’engouement et dans ma tête c’était fait. Au final, je pense que je dois ma sélection à toute la communauté derrière, tout le monde m’envoyait des messages, Jul a répondu à Raplume et finalement j’ai été retenu.

Au final, tu es retenu, et il y a une propagande pour toi. Tu es un des favoris, tu penses que tu vas dérocher la cover ? 

On sait jamais, quand j’ai vu que pour la première phase je n’avais pas été retenu, je me suis dit « rien n’est gagné ». Là quand j’ai vu les votes j’étais devant, mais je préfère ne pas me donner de faux espoirs pour au final être déçu. Mais même si j’suis pas retenu, voir tout l’engouement qu’il y a eu autour, c’est quelque chose de fou. (finalement, Jul a annoncé sur Instagram que la pochette de Zeiqh avait été retenue – ndlr)

 Justement, à l’heure où on se parle rien n’a été annoncé, mais tu peux me dire ce que ça représenterait pour toi d’avoir réalisé la cover d’un album qui sera sûrement au moins platine ?

C’est un truc de ouf, comme je disais j’avais fait la pochette de DTF et de voir mon travail en allant au magasin, de voir ma pochette, j’étais ultra-fier. Quand ils étaient passés sur Clique, plein de potes me disaient « oh regarde c’est ta cover » et là ça va être encore plus gros. Au final tout ça c’est grâce aux gens qui ont relayé, si les gens ne m’avaient pas autant poussé on ne serait pas en train de discuter en ce moment ! 

Tu as réalisé pas mal d’autres projets en lien avec le rap, je pense à un clip conceptuel pour « Autre monde » de PNL ou à une animation pour Dinos. C’est quoi ton rapport au rap ? 

C’est ce que j’écoute le plus, je suis un grand fan de rap US, mais j’adore le rap français aussi. C’est vraiment ce que j’écoute le plus depuis tout petit, comme j’ai 19 ans, ma génération on a tous été baignés là-dedans. 

Qui est-ce-qui t’a fait aimer le rap ?

Au départ c’était plus mon cousin qui, quand j’étais petit, me faisait écouter Sniper, NTM, Booba, Rohff, les Psy4 de la Rime… et après il y a eu la Sexion d’Assaut. Ce sont ces rappeurs-là qui m’ont fait aimer le rap. En ce moment j’écoute NAV qui a sorti un album vendredi (« Good Intentions »), toujours du Booba, les classiques comme « Strass et paillettes » parce que j’adore vraiment ça, l’album « Mauvais œil » avec Ali. Après bien sûr il y a PNL, Pop Smoke forcément, toujours Young Thug, l’album de Lil Uzi Vert (« Eternal Atak ») aussi. En rap français l’album « Taciturne » de Dinos, c’est pour ça que j’ai fait ma petite illustration, l’avant dernier dernier album de Jul aussi (« Rien 100 Rien »), j’écoute pas mal en fonction des sorties et j’ajoute des sons à mes playlists pour les réécouter plus tard. SCH, 13 Block, très très forts aussi…

Fifou disait dans le #MidiMinuitLive qu’il ne se sentait pas du tout intouchable, et qu’ils n’avaient plus avec Koria leur place « attitrée » de n°1 pour les covers rap français. Tu en penses quoi ? 

D’un côté c’est bien, parce que ce n’est pas toujours bon de se sentir trop à l’aise, si on se sent intouchables on tend à se laisser aller. C’est bien parce que ça peut les amener à collaborer, après s’ils sont au top depuis aussi longtemps c’est qu’il y a une raison, c’est qu’ils sont très très chauds.

Maintenant parle-moi de toi, tu es sur quels projets ?

J’ai une cover qui est en cours pour un autre artiste. Je vais finir mes études aussi, il faut pas l’oublier ça et que je commence à partir en sucette ! J’ai des gens qui viennent se renseigner sur mes tarifs, et c’est à peu près tout.

 

Retrouvez Zeiqh sur Twitter et Instagram.

Dorian Lacour